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Les Cahiers de la communication interne n°5 : La communication interne dans le nouveau paysage économique

Cahiers de la Com
1 septembre 1999

EDITORIAL

La vraie nature d’intranet…

Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) ont perdu ce “N” qui, hier encore, les qualifiaient de “Nouvelles”. Ainsi va l’histoire et la vitesse du changement… L’élision consacre l’avènement de l’ère de l’information et du management des connaissances. Les TIC modifient de façon considérable le champ et les applications de la communication dans l’entreprise. Au-delà de la transmission des informations et du partage des connaissances, les relations multiples et croisées entre communication, organisation, travail coopératif, management des connaissances, aide à la décision, s’expriment de façon plus manifeste, dans un entrelacs serré et coordonné. Après celle de l’internet, la vraie nature de la révolution intranet s’impose de façon progressive aux esprits, en même temps que se clarifie le champ élargi de ses promesses. Elle contribue à rendre visible l’invisible, à formaliser le fonctionnement et les échanges au sein d’une entreprise ou d’une institution.

En premier lieu, internet et intranet, même s’ils adoptent des protocoles identiques, ne sont pas de même nature. Il convient de récuser l’image idyllique d’une entreprise libérée des rétentions d’information, des pesanteurs du passé, par la simple magie d’un nouvel outil. Au monde ouvert d’internet – par essence sans contraintes et sans limites, de par la volonté même de ses concepteurs – s’oppose celui, hiérarchique, structuré et organisé de l’entreprise, auquel s’attache l’intranet. La complexité, à terme, réside dans l’aspect inéluctable des échanges croissants entre ces deux univers, pourtant si complémentaires. L’intranet n’est dès lors qu’une convention de langage, temporaire, appelée à définir le champ des applications IP (Internet Protocol) dans l’enceinte de l’entreprise.

En second lieu, intranet manifeste des accointances avec internet en ce sens “qu’il n’appartient à personne” dans l’entreprise, même si la responsabilité peut être déléguée à un individu. Cette formule, sous forme de boutade, laisse sous-entendre, de façon simple, qu’il n’est pas l’un de ces systèmes propriétaires de l’ancien temps, placé sous la responsabilité d’un chef de projet unique. En clair, intranet conduit à l’interdisciplinarité, c’est-à-dire à associer dans un projet commun des représentants de directions parfois éloignées les unes des autres par leurs métiers respectifs. Si communication et communication interne ont des intérêts communs, il n’en est pas toujours de même avec l’informatique, l’organisation ou certains autres métiers. Intranet induit une dynamique de partage. Pour banal qu’il soit, ce constat incite à s’interroger sur une nouvelle approche de l’entreprise, transversale cette fois et non plus cantonnée aux traditionnels clivages des champs de pouvoirs verticaux. Le système d’information de l’entreprise n’est plus compris dans la simple acception informatique qu’il revêtait il y a quelque temps encore, mais dans sa réalité globale et systémique qui associe contenu et contenant, de façon de plus en plus indissociable.

En troisième lieu, les effets de l’intranet, comme de l’internet, ont été perçus de façon claire par Marc Guillaume, en France, comme par Michel Cartier, Professeur de communication à l’Université de Québec, à Montréal. Ils expriment, de manière assez voisine mais convaincante, deux conclusions très proches. Il importe de se convaincre que la technologie ne change pas les comportements par elle-même. En revanche, le choix d’une technologie particulière conduit à se changer soi-même, de façon à tirer tous les bénéfices des avantages qu’elle apporte. D’une autre façon, les nouveaux outils n’engendrent pas de changements sociaux par eux-mêmes. Ce sont les mutations sociales et démographiques qui conduisent les sociétés contemporaines à créer les nouveaux outils destinés à répondre aux défis qu’elles s’imposent, dans une économie globale et dérégulée. Ralph Larsen, Président de Johnson & Johnson, n’hésite pas à utiliser cette formule quelque peu enthousiaste mais révélatrice de l’état d’esprit suscité par le réseau des réseaux dans l’entreprise : “intranet libère la puissance intellectuelle des entreprises. Il permet de faire des choses que nous ne faisions pas auparavant et des contributions que nos collaborateurs ne pouvaient apporter”. Emporté par l’élan, risquons-nous à ajouter : intranet permet de faire des choses que l’on n’imaginait pas de faire auparavant !

En fait, la technologie d’internet, appliquée à l’intranet, est le révélateur du champ gigantesque des mutations possibles au sein de l’entreprise. Il y a peu, la réunion de Williamsburg, aux USA, a analysé comme chaque année – par un exercice d’introspection salutaire et pragmatique – les raisons de la performance de l’économie américaine. Pour la première fois, en 1999, elle a diagnostiqué les effets de l’intranet sur l’amélioration sensible de la productivité, notamment dans le domaine du service. Wall Street intègre depuis un an, dans ses calculs de performance, les effets de ce que les Anglo-Saxons appellent déjà la “Nouvelle économie”.

En conclusion, d’un avis unanime les acteurs de l’entreprise s’accordent à reconnaître que l’intranet n’est plus désormais ce simple outil, considéré au départ comme un phénomène technologique transitoire. Accueilli avec suspicion par certains sceptiques goguenards, convaincus de sa rapide retraite dans le grenier empoussiéré des outils passés de mode, il est désormais considéré avec un regard nouveau par ceux-là mêmes qui doutaient hier encore. Un monde est à réinventer. Il faut toutefois savoir raison garder. L’intranet et la facilité d’échange qu’il instaure doivent inciter à distinguer l’urgent de l’important et à veiller à un double équilibre. Associés, dans une nouvelle stratégie éditoriale, l’imprimé et l’écran demeurent complémentaires. Et le maintien des échanges relationnels (le chaud) vient en appui des échanges technologiques (le froid).

Par

Michel Germain

Directeur d’Arctus, Maître de conférence associé au Celsa Auteur de “l’Intranet” (Éditions Economica)

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